L’artiste démantèle en dix mille lettres de plâtre moulées à la main des phrases dites par les philosophes, socio-logues et autres personnalités qui participent de son horizon philosophique de référence... Les lettres blanches de seize centimètres de hauteur font de sages piles : les A ensemble, les B ensemble, etc. Melik Ohanian évoque à leur égard le retour à un stade pré-linguistique du langage. Chaque tas correspond à la retranscription de l’extrait d’une archive sonore de la voix d’une personnalité, mais ici les lettres qui constituent cette retranscription sont posées à même le sol et dans le désordre. Brouillage. Seule une plaque portant le nom de la personne citée est présente sur la ligne de néons surplombant les tas et nous informe de la paternité de la citation. Quelques mots émergent de cette mer de lettres, car les visiteurs sont autorisés à s’emparer des signes de plâtre pour réintroduire du sens. Si les citations sont disposées au Plateau comme autant d’archipels rendus à une pure morphologie, bornés à leur seule plasticité, il n’en demeure pas moins que celles-ci sont rattachées à un autre archipel (les quinze expositions conjointes) et au site internet qui vient en quelque sorte reterritorialiser l’ensemble en un mouvement de déterritorialisation/reterritorialisation très deleuzien. La « lecture » des tas de lettres se voit donc informée – par avance ou rétroactivement – par le sens délivré sur internet.
— Cédric Schönwald (extrait du livre de l'exposition From The Voice To The Hand à Paris, 2008)
The artist dismantled phrases said by philosophers, sociologists and other figures above within his philosophical horizon, creating heaps of letters in the form of hand-made plaster casts... The white letters measured 16 cm in height and were placed in tidy piles: the ‘A’s together, the ‘B’s together, and so on. Through these, Melik Ohanian evoked a pre-linguistic stage of language. Each heap corresponded to the retranscription of the soundtrack extract of a figure’s voice, but here the letters forming this retranscription were piled up on the floor in disorder. Estrangement. Only a plaque bearing the name of the person quoted was present above the line of neon lights above the heaps, informing us of the paternity of the quotation. A few words emerged from this sea of letters, because the visitors were allowed to move the plaster letters around to re-introduce some meaning. Although the quotations were set out in Le Plateau like a series of archipelagos reduced to pure morphology, to their simple three-dimensional form, the fact remains that these were linked to another archipelago (the 15 joint exhibitions) and to the website, which in some way restored a territory to the whole in a movement of deterritorialisation/ reterritorialisation reminiscent of Deleuze. The “reading” of the heaps of letters was thus influenced — in advance or retroactively — by the meaning conveyed through the Internet.
—Cédric Schönwald (extract from From The Voice To The Hand's booklet at Paris, 2008)